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Psychologie de l’assiette

Peut-on lire dans le fond de l’assiette la personnalité de celui qui l’a saucée ? La formule « Dis-moi ce que tu manges, je te dirai qui tu es », est-elle aussi fumeuse qu’une cuisse de poulet grillé ?  Investigations entre la table et le divan pour une réflexion mi-prise de tête, mi-prise de bec.

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Voilà plusieurs jours que vous avez une folle envie de kaki. Un désir irrépressible qui vous fait faire le tour du quartier pour trouver votre came. Vous êtes dans le même état qu’un 1er mai à chercher une pharmacie de garde pour choper des nicorettes. C’est grave docteur ? « Au contraire, précise la diététicienne Florence Servas-Taithe, cette envie traduit sans doute un besoin de l’organisme en fer et en vitamines C, il ne faut surtout pas hésiter à s’écouter. Lorsque les femmes enceintes ont des envie de fraises, ce n’est pas un caprice hormonal mais un appel de l’organisme. Etre enceinte, c’est se recentrer sur soi, être à l’affût de ses sensations. C’est souvent à cette période que l’on sait le mieux ce qui nous convient dans l’assiette. »

Que les mâles se rassurent, pas besoin d’être boostés aux oestrogènes pour saisir ce qui nous fait du bien. L’instinctothérapie a d’ailleurs été inventée par un homme, le suisse Guy-Claude Burger (assez chelou) il y a 50 ans. L’instinctoquoi ? Le  mouvement considère que tout être humain, tel un zèbre ou une gazelle dispose d’un instinct alimentaire qui lui permet de ne manger que ce dont il a besoin. Le problème c’est que depuis que la cuisine existe, cet instinct se noie dans les sauces et les fumets. Pour retrouver leur désirs primitifs et ne pas se laisser berner par des plats cuisinés, les instinctos organisent des buffets sur lesquels sont posés des matières brutes. Rien à voir avec celui du mariage du petit cousin, l’ambiance est plus sortie de champs. Chacun se laisse porter par son estomac et se rue sur un chou rave cru ou une carotte. « L’instinct alimentaire et le plaisir du palais ne sont ainsi que deux aspects d’un même phénomène. Ils nous poussent à manger ce qui nous est utile. Nous sommes conscients du plaisir et inconscients de l’instinct. Mais ils œuvrent ensemble pour notre santé, » précise le site. Soit.

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Et quand on a toujours envie de frites c’est parce que notre organisme a un besoin constant de graisses saturées ? « Ca serait trop simple, assure Florence. D’abord, parce qu’il existe dans l’industrie agro-alimentaire certains produits appétants qui peuvent simuler artificiellement la faim ou l’envie. Ensuite parce que les désirs de chocolat, de cheese bugers, de fraises Tagada sont souvent une revanche de l’esprit sur le corps. On en a envie parce qu’on en a été privés dans l’enfance ou parce qu’on sait précisément qu’ils ne sont pas bons pour nous. On parle d’aliments tabou que l’on s’offre comme une régression ou une transgression. Lorsqu’on s’enfile une tablette de chocolat tous les soirs, on n’est plus dans le plaisir mais dans le fantasme du plaisir de manger du Cote d’Or. Mais quand on les mange sans culpabilité, on n’en a pas envie longtemps. »

« Nous sommes naturellement équipés sur un plan physiologique et psychologique pour pouvoir manger de façon intuitive, ajoute le psychiatre Gérard Apfeldorfer dans le magazine Psychologies. Nous pouvons donc nous laisser guider par un certain nombre de sensations et d’émotions : se fier à sa faim pour manger, et à la satiété pour s’arrêter ; voire à des choses plus subtiles, comme les appétits spécifiques. Par exemple, lorsque nous sommes carencés en vitamine B9, nous développons une appétence automatique pour les aliments qui en contiennent, telles les fraises. Ou nous avons plus envie de viande quand nous sommes anémiés. » Evidemment cela nécessite d’écouter son corps plutôt que de laisser parler sa tête. Pas fastoche…

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D’autant que l’on ne mange pas toujours pour se nourrir mais aussi pour partager un acte social ou pour répondre à une émotion. « L’alimentation, c’est être rassasié physiologiquement et prendre du plaisir, précise Florence. Si l’un des deux aspects est absent, on dérape. » C’est ainsi que l’on se met à boulotter devant la télé, happé par l’image plutôt que par le contenu de l’assiette. Que l’on mange trop pour s’anesthésier, que l’on s’offre un repas-doudou pour se remonter le moral (la fameuse plâtrée de coquillettes au beurre quand on a passé une sale journée). « On a tous des désordres alimentaires de façon ponctuelle, rassure la spécialiste. On ne mange pas que pour combler sa faim mais aussi pour répondre à d’autres émotions : la joie, l’angoisse… Le tout est de ne pas se laisser déborder par celles-ci dans la durée. Les excès s’ils sont ponctuels et décomplexés ne posent aucun problème.»

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Admettons donc que nous soyons tous parfaitement sains d’esprit, nullement pollués par les messages sanitaires flippants, pas du tout envieux des jambes de Natalia Vodianova, insensibles à toute émotion. Bref, imaginons que nous soyons des lions de la savane. Dans ce contexte, mangerions-nous tous la même chose ? « Pas du tout. Chacun a son propre rythme, certains ont faim le matin, d’autres le soir. Certains font de gros repas, d’autres adorent picorer. Il faut pouvoir suivre son propre tempo et manger en pleine conscience. A vouloir mettre tout le monde dans le même costume, on dérègle tout. La terre entière ne doit pas rentrer dans un 38. En tant que diététicienne, je peux vous l’affirmer : la minceur ne fait pas le bonheur. »

« Le secret consiste à réapprendre à manger de manière civilisée, conclut Gérard Apfeldorfer. Nous avons besoin de respecter les règles sociales : s’assoir à une table, manger avec des couverts, se tenir correctement, faire attention au goût. Nous avons également besoin de respecter une culture alimentaire qui transmette les recettes qui ont réussi à nos parents, à nos grands- parents, à nos aïeux, et qui constitue un cadre de base d’associations d’aliments. Lorsque ces conditions sont réunies, nous pouvons écouter nos sensations et retrouver la façon intuitive de nous nourrir. »

Dis-moi ce que tu manges, je te dirai… que tu es ce que tu es et que l’alimentation est vraiment une science très compliquée. Bon appétit.

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3 commentaires

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  1. Le cerveau analyse selon des réseaux obscurs… pas de recette miracle, j’ai 47ans et subit des travers anorexiques qui me maintiennent sur le fiil du rasoir depuis de nombreuses années, malgré une connaissance approfondie de la nutrition, mais avec une lucidité qui m’aide à sortir la tête de l’eau au quotidien. le rapport a l’assiette est bien plus parlant qu’il n’y parait, il dépeind un rapport au plaisir et à l’autre, il est symbole du lien social.

    1. Bonjour Sylvie,

      Ayant connu cette « …. de maladie » je comprends ce que tu ressens,
      hé oui! il y a toute une multitude de paramètre qui entrent dans l’alimentation.
      L’anorexie, c’est aussi s’anesthésier par la faim, par le contrôle, de qui? de quoi?, cette maladie même nous le fait oublier….
      Je ne vais pas écrire un roman, mais je te souhaite bien du courage, de la lumière dans ta vie pour te reconnecter à tes forces de vie, de joie, à l’autre et l’univers.
      Je t’embrasse

      Raphaëlle

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