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On joue à tonte mouton ?

Ils sont rares les éleveurs à tondre leurs moutons pour récupérer la laine. Eric et Paul de Latour, éleveurs bio en Ariège sont de ceux-là. Le jour où ils ont tondu leurs 856 brebis, j’étais là avec mon appareil photo et mon stylo. Récit.

A moutons

On pourrait croire que la pratique est banale, il n’en est rien. Valoriser la laine de ses moutons semble relever du siècle dernier. En 2015, quand les éleveurs font la boule à zéro de leur troupeau, au pire ils jettent la tonsure ; au mieux, ils la cèdent à des négociants pour trois francs six sous. La laine est alors vendue moins chère que le prix de revient de la tonte. Et c’est ainsi que la laine finit souvent dans les futons japonais.

Tondeur sachant tondre un mouton en moins d'une minute.
Tondeur sachant tondre un mouton en moins d’une minute.

Eric de Latour et son fils Paul, pourtant très XXIe siècle ont décidé cette année de valoriser la laine de leurs moutons sous forme de fil, de laine cardée, de flocons, couettes et j’en passe. Pour pouvoir utiliser leur laine, ils ont fait appel à Olivia, animatrice et coordinatrice de la filière laine en Ariège. Son but ? Valoriser la laine locale et donner du sens à une ressource considérée aujourd’hui comme un déchet. Le travail de la jeune femme est de montrer aux éleveurs les possibilités de transformation de la laine localement et de les aider à la commercialiser. Le travail d’Olivia passe aussi par la sensibilisation des consommateurs pour redonner du sens au terme « laine », lorsque la plupart des placards ne sont plus que fibres synthétiques.

« La transformation de la laine française s’est écroulée dans les années 80, raconte la spécialiste. Deux événements sont à l’origine de cette crise. L’apparition des fibres synthétiques et l’industrialisation. » En effet, les élevages de moutons « à laine » se sont développés en Nouvelle-Zélande, Australie, Afrique du Sud et Amérique du Sud, là où de grandes plaines permettent l’installation de troupeaux homogènes, avec un mode d’élevage intensif. « En France, où les races ovines sont rustiques et différentes, l’uniformisation est impensable. »

Brebis dans les starting blocks.
Brebis dans les starting blocks.

Revenons à nos moutons. La tonte des 856 brebis d’Eric et Paul est sur le point de démarrer. Ce sont des brebis de race Tarasconnaise, rustiques et transhumantes ariégeoises. La famille et les amis ont répondu présents et sont prêts à attaquer une journée sportive. Chacun est à son poste.

Côté tonte : les 6 attrapeurs, les 4 tondeurs, les 7 ramasseuses.

Parmi les tondeurs, Thimoléon, quintuple champion de France, qui est capable de tondre une brebis en moins d’une minute et avec douceur s’il vous plait.

Côté tri de la laine : 7 filles pour séparer les parties abimées des toisons et remplir les grands sacs appelés curons. La laine de meilleure qualité d’un côté, le reste de l’autre.

L'équipe de choc.
L’équipe de choc.

Gong de départ ! La première brebis passe au toilettage. En moins de 3 minutes, elle est attrapée, tondue et libérée. Sa laine est déjà triée, au fond des curons. La répétition de la veille a été efficace. Le jour J, tout va très vite et si l’un des travailleurs traine un peu, c’est toute la chaine qui est déstabilisée.

Triage et papotage.
Triage et papotage.

L’opération est répétée 856 fois. Les brebis passent entre les mains des 4 tondeurs tous plus agiles les uns que les autres. En fin d’après-midi, le troupeau est tondu. Les tondeurs, attrapeurs et trieuses sont éreintés et recouverts de suint. C’est l’heure du bilan, avant un bon repas partagé et mérité : 850 kg de laine récoltée, 415 kg de laine triée à garder (dont 215 kg gardés et 150 kg vendus à une association pyrénéenne qui confectionne des bérets).

Opération lavage, à grandes eaux.
Opération lavage, à grandes eaux.

Un peu plus tard dans la saison, la laine sera apportée à la filature de Niaux. Là, elle sera trempée dans une cuve d’eau chaude et de lessive, pour la dégraisser de son suint.

Le rinçage se fera ensuite à grandes eaux. On procèdera à l’essorage dans une machine, puis au séchage… en plein air car c’est l’été !

Laine séchée au soleil, c'est quand même mieux que 100% polyester non ?
Laine séchée au soleil, c’est quand même mieux que 100% polyester non ?

Enfin, la laine toute propre remise en sac, attendra sa transformation… en fil cardé et flocons de rembourrage à la filature de Niaux et en couettes par l’entreprise Tissages cathares de Lavelanet.

De notre côté, on n’est plus inquiets. L’hiver pourra être rude, nous serons équipés !

6 commentaires

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  1. Bonjour,
    Pourriez vous indiquer quelle est cette « association pyrénéenne qui confectionne des bérets ».
    Merci pour votre réponse.

  2. Bonjour,
    Je cherche à contacter Olivia, animatrice et coordinatrice de la filière laine en Ariège. Nous avons pour projet mon mari Baptiste et moi d’acquérir une ferme de 40ha dans le Séronais et nous désirons nous associer avec un éleveur recherchant une Terre et un lieu de vie pour y produire de la laine de moutons et/ou de mohair et/ou d’alpaga… Respectant une éthique avec les animaux! Baptiste veut faire des jardins: potagers, vergers, plantes médicinales en permaculture et moi je suis naturopathe. Nous voulons accueillir des stages pour personnes désireuses de prendre leur santé en main, découvrir la permaculture et pourquoi pas découvrir la laine au travers d’ateliers de transformation : cardage, filage, confection de vêtements ou d’objets à base de laine bouillie, teinture végétale, tissage, tricot…. L’éleveur occuperait les Terres avec les animaux.
    Je vous remercie par avance de votre réponse en espérant que vous pourrez nous aider.
    Bonne continuation à la Ruche qui dit oui! Mille belles pensées Emmanuelle.

    1. elle est vendue à un négociant qui généralement la destine au marché chinois.

  3. en Ardèche on a Ardelaine, allez y faire un tour, ça se visite, et en plus il y a un resto gastronomique. un petit reportage?

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