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Martine à la ferme (du Val d’Authie)

En Nord-Pas-de-Calais, Thierry et Martine élèvent une centaine de chèvres et interrogent les usages agricoles conventionnels. Découverte.

Dans un coin de la chèvrerie, une biquette pousse des cris. Rauques. Continus. Thierry enjambe la barrière, remonte ses manches et plonge ses mains nues à l’intérieur de l’animal, jusqu’aux coudes. Il en ressort un chevreau, puis deux, puis trois. Comme ça, en moins de 5 minutes, avec des gestes précis et quasi mécaniques. La portée mise à l’abri, près du ventre de la mère, l’éleveur tapote la tête de la chèvre pour la féliciter. Un peu comme quand on encourage son cheval quand il a bien franchi l’obstacle. « Elles sont chochottes les chèvres, il faut toujours qu’elles couinent, » rapporte Thierry à son retour.

Dans notre village fleuri, au début c'était dur de faire accepter nos chèvres.
Dans notre village fleuri, au début c’était dur de faire accepter nos chèvres.

Lui, n’est pas du genre à se plaindre, c’est plutôt un homme d’action. Son élevage de chèvres, il l’a démarré en 1987, dans une région où le paysage semblait ne connaître que les vaches. « Avec mes 18 bêtes, on me prenait pour un rigolo, un marginal échappé du Larzac »,  se souvient le jeune quinquagénaire. Depuis, Thierry multiplie les expériences et n’en finit pas de choquer ses voisins. Sur les 80 hectares de céréales qu’il cultive pour nourrir notamment son troupeau, il pratique le semis sans labour.

Rhabiller les sols. « Je ne laboure plus le sol depuis 10 ans. Mes terres ne sont jamais à nu. Depuis deux ans, je sème directement sur les plantes existantes. C’est un excellent moyen pour préserver la terre et se dispenser d’insecticides, de fongicides et d’herbicides. » Evidemment dans la région, ses confrères le regardent un peu de travers, ses champs ne répondant pas aux critères de beauté des techniciens agricoles. « Je suis obligé de mettre un panneau – on a semé – sinon les agriculteurs en voyant quelques matricaires ici et là pensent qu’il s’agit d’une friche. »

Le terrain de jeux des blondes d'Aquitaine.
Le terrain de jeux des blondes d’Aquitaine.

Au final, sa récolte est de l’ordre de 10% inférieure à celle des voisins mais a permis d’économiser pas mal de litres de gasoil et plait aux animaux de la ferme. La centaine de chèvres blanches ou caramel s’offrent de bonnes rations de céréales maison. Escourgeon (un orge d’hiver), avoine et luzerne leur sont réservés alors que les betteraves fourragères nourrissent les 130 vaches allaitantes destinées à la viande. «Les Blondes d’Aquitaine, c’est moins sympa que des chèvres, raconte Thierry. Un jour après un mauvais vêlage je me suis fait casser les côtes par une bête. » Quant au reste de la production céréalière, blé et maïs, il est vendu à la coopérative.

Aujourd'hui, les vaches allaitantes sont vendues à des négociants. A quand la vente directe ?
Aujourd’hui, les vaches allaitantes sont vendues à des négociants. A quand la vente directe ?

Sous le soleil exactement. Au milieu du troupeau,  deux boucs, un alpin et un saaneen immaculé semblent admirer leurs progénitures (de loin). «Cette année, nous avons essayé de dé-saisonnaliser un peu le troupeau pour étendre notre période de production de lait, explique Martine. Pendant 60 jours, nous leur apportons 16h de lumière quotidienne pour faire croire à l’été et reproduire le cycle naturel. » Sans ce leurre lumineux, les chèvres reproduisent invariablement le même cycle, toutes en même temps. Elles sont en chaleur pendant 45 jours vers les mois d’été et leur gestation dure 5 mois. Comme on les laisse tranquilles 2 mois avant la mise bas, en début d’année, il y a toujours un moment où il n’y a pas fromages. « Cette méthode est indolore pour les chèvres, témoigne Martine. Dans certains élevages on leur administre des médicaments pour stimuler leur excitation.»

Ambiance maternité au printemps.
Ambiance maternité au printemps.

Ne jamais dire jamais. Il y a 30 ans, Martine, fille d’agriculteurs née dans cette maison, s’était juré de ne pas épouser un paysan. Préparatrice en pharmacie, elle a pourtant croisé Thierry et transformé sa maison en ferme puis construit une fromagerie, un laboratoire de transformation aux normes dans lequel elle fabrique ses chèvres frais, en cœur, au poivre, au cranberries. Aujourd’hui, elle y prend même beaucoup de plaisir. Que voulez-vous, dans la famille, il semblerait que le gène d’agriculteur soit dominant. Leurs trois enfants dont la cadette Louise en école d’agronomie songent un jour à reprendre l’exploitation…

 

2 commentaires

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  1. Salut. 3 fromages afine jeudi 12 à la ruche de la rue Belliard à Paris Délicieux Délicieux et en sup. Deux petits cœurs secs j’adore merci merci. Anni

  2. Je suis contre FACEBOOK
    Très bien votre site
    Je découvre
    Je fais partie de 2 jardins partagés
    Au début (et même maintenant) je ne sais rien. J’apprends la patience

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